Blog Notes de Golf Canada

Poursuivre un rêve, c’est déjà l’accomplir

Rick Sovereign

Tout golfeur apprend à savourer chaque partie comme si c’était sa dernière. Cette leçon m’a été rappelée avec la perte d’un de mes meilleurs amis, Rick Sovereign, au terme d’un long combat contre le cancer.

« Sovy » était un golfeur chevronné de Brantford (Ontario) qui poursuivait un rêve : devenir golfeur professionnel. Joueur adroit, il était respecté comme mentor sur les circuits qu’il fréquentait. Au-delà de son habileté à frapper la balle, j’admirais son talent de rassembleur. C’était plus que de l’amitié, c’était la chaleur de son accueil et sa façon de nous faire apprécier toutes ces petites choses, au golf comme dans la vie, que nous tenons pour acquises.

Il était aussi féroce comme concurrent que parfait gentleman; c’était un homme de grande qualité. L’entraîneur de golf canadien Ralph Bauer a décrit ainsi l’influence de Sovy : « En dehors de ma famille immédiate, personne n’a eu de plus grand impact sur ma vie. »

Nos parties de golf ensemble sont parmi mes souvenirs les plus chers. Je suis loin d’être le meilleur golfeur au monde, mais comme quiconque a eu la chance de jouer avec un professionnel, je sais apprécier ceux qui maîtrisent le jeu. Sovy me donnait 10 coups – cinq par côté – et nous étions sur un pied d’égalité. J’ai perdu plus souvent qu’autrement, mais j’y ai tellement gagné.

Le golf était autant affaire de camaraderie que de défi pour une mise de 5$ la partie. Il était bien meilleur joueur que moi, mais jamais arrogant. Il me mettait au défi d’avoir du plaisir, quel que soit le résultat. Il parlait de l’impalpable au golf, des moments mémorables, des voyages ou de ces petites choses qui en font un sport hors du commun. Tout golfeur connaît ça.

En tant que professionnel, Sovy était passionné de compétition et déterminé à s’améliorer. Je me souviens à quel point il voulait participer à notre omnium national après avoir concouru à des douzaines de qualifications régionales sans progresser. Il y en a qui se demandaient pourquoi il se donnait cette peine après tant de finales décevantes. Il citait un poème, et un vers en particulier célébrant sa vie : « Poursuivre un rêve, c’est déjà l’accomplir. »

Cette façon particulière qu’avait Sovy d’appréhender le golf me rappelle pourquoi j’adore ce jeu – le cheminement pour s’améliorer, la passion de concourir et de jouer au mieux de ses capacités. Je ne veux pas que le golf devienne plus facile. Le défi de notre sport – le coup parfait sur la balle ou la chance de réaliser un coup incroyable – est partie intégrante de son attrait.

Je souhaite à chaque golfeur d’avoir un Sovy dans sa vie, quelqu’un qui l’encourage à aimer le golf pour ce qu’il est. Un partenaire de jeu qui ne tolère pas les éclats de frustration que peut provoquer un mauvais pointage. Un parent reconnaissant des rencontres que le golf amène dans nos vies. Un ami qui nous rappelle pourquoi nous aimons y jouer.

Avant son départ, les amis de Sovy ont promis d’honorer sa mémoire en célébrant le plaisir de jouer au golf. Il nous mettait au défi de savourer chaque partie comme si c’était la dernière. Tout comme nos parties à 5$ d’enjeu, c’est un défi que j’ai hâte de relever.


La poursuite d’un rêve

Alors que la foule suivait le jeune champion, en quête d’autographes, un vieil homme se tenait seul, sur fond de soleil couchant.

Son regard songeur contemplait l’horizon, ne révélant rien des sentiers qu’il avait choisis.

Ses mains calleuses trahissaient des années d’efforts, symbole des sacrifices consentis au long de son parcours.

Les rides profondes de son visage hâlé témoignaient aussi des longues heures consacrées à son rêve.

À la fin, l’âge et la maladie réclameraient leur dû d’un corps jadis robuste.

Au premier coup d’oeil, il illustrait le désespoir, celui d’un rêve agonisant.

Mais en y regardant de plus près, on décèle un fin sourire, de ceux que l’on réserve à la satisfaction d’être fidèle à soi-même.

Il nous reste l’impression que le résultat n’a pas d’importance, que poursuivre un rêve, c’est déjà l’accomplir.

Rick Sovereign – 1991


Cet article a été publié initiallement dans le numéro d’avril 2014 du magazine Golf Canada.