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George Seymour Lyon, le golfeur médaillé d’or du Canada

George Seymour Lyon

Il y a 110 ans, le golf, pour la première et dernière fois de l’histoire, du moins jusqu’en 2016, était intégré au programme des Jeux olympiques. Et c’est un Canadien, George Seymour Lyon, qui raflait la médaille d’or. Certains en furent peut-être surpris, mais c’était mal connaître cet homme.

Cet athlète accompli avait plusieurs cordes à son arc. À 18 ans, Lyon établissait le record canadien du saut à la perche, puis interrompait momentanément sa carrière sportive prometteuse pour devenir sergent dans les Queen’s Own Rifles (Fusiliers de la Reine du Canada), un régiment d’infanterie légère qui, en 1885, étouffa la Rébellion du Nord-Ouest.

De retour à Toronto, il fut nommé capitaine de l’équipe de baseball– il était deuxième-but – qui allait gagner le championnat de la ville. De plus, il maniait la raquette de tennis avec grand art et, doté d’une excellente coordination oculo-manuelle, il devint un as du cricket, établissant même un record canadien de 238 points à la batte. Pourtant, Lyon ne se mit à la pratique du golf qu’à l’âge avancé de 38 ans.

Octobre 1896. Lyon joue au cricket au Rosedale Cricket Grounds, adjacent à un parcours de golf où se trouve son ami John Dick. Celui-ci aperçoit Lyon, batte à la main. Pour le taquiner, il lui fait remarquer qu’il a besoin d’une grande surface pour frapper la balle et le met au défi de claquer une balle de golf avec un bâton de golf. Le reste ap- partient à l’histoire… olympique.

Lyon n’a ni le physique ni le comporte- ment du golfeur type. Il est corpulent, friand de blagues et affiche un enthousiasme tapageur. Il est du genre à entonner en public un couplet de My Wild Irish Rose ou à marcher sur les mains pour épater la galerie. Sur le parcours, les golfeurs très collet monté n’en croient pas leurs yeux quand ils le voient expédier la balle loin dans l’allée, certes, mais avec un élan hors normes. Néanmoins, il ne lui faut qu’un an pour anniversaire, en 1898, il gagne le titre amateur canadien, exploit qu’il répétera en 1900 et 1903.

En 1904, Lyon est l’un des 84 golfeurs nord-américains et européens inscrits à la compétition olympique de golf aux Jeux de St. Louis, Missouri. Le 18 septembre, une épreuve de qualification au Glen Echo Club réduit le nombre de participants à
32. Le grand favori, l’Américain Chandler Egan, est en tête et Lyon neuvième. Au deuxième tour, Lyon cause un certain émoi en prenant la mesure de son adversaire, le chouchou de la foule.

Comme on peut s’y attendre, les journaux de St. Louis n’apprécient guère le style de Lyon. Bien sûr, il frappe la balle sur d’énormes distances, mais cela mérite-t-il le nom de « golf »? Malgré tout, il fait partie des huit joueurs d’élite restants : trois de St. Louis, trois de Chicago, un de Seattle et ce Canadien inattendu que l’on calomnie à qui mieux mieux. Faisant fi des mauvaises langues, Lyon défait par quatre coups son rival du troisième tour.

En demi-finale, il affronte Francis Newton, champion de la Côte du Pacifique. D’aucuns diront que ce fut le meilleur la plus ingénieuse de l’histoire de l’Amérique du Nord ». Le coup du match est réussi par Lyon : une frappe de 327 verges!

Le Canadien était donné perdant au départ, mais le voici en finale, à une victoire de la médaille d’or. Pourtant, rares sont ceux qui favorisent Lyon qui doit battre
le tout nouveau champion des États-Unis, Chandler Egan, âgé de 23 ans. Tout de même, c’est débordant d’enthousiasme, comme à son habitude, que le Canadien entreprend les deux rondes finales de 18 trous. Au premier tertre, il est accueilli par des applaudissements polis. Il expédie la balle à huit verges de la cible sur ce trou de 276 verges et, deux roulés plus tard, il gagne le trou. Egan et Lyon font jeu égal sur les 17 trous suivants, si bien que Lyon maintient son avance d’un trou après 18.

Après le lunch, le départ de la ronde finale est donné à 15 heures. Dans le pavillon, il n’est question que du grand match qui vient de se terminer. Le bouche- à-oreille joue son rôle, et les spectateurs tandis que la balle d’Egan se perd dans le lac. Lyon reprend son avance de deux coups. Lyon gagne aussi le trou suivant et remporte le match par trois coups, mettant fin à ce que l’on qualifiera de « plus grand tournoi de golf jamais présenté en Amérique ».

Les spectateurs fraient un chemin à Lyon vers le pavillon où l’attendent son trophée et sa médaille. Avec l’énergie indomptable qui le caractérise, Lyon s’y rend en marchant sur les mains. Tard dans la soirée, tout le monde entonne sa chanson favorite, My Wild Irish Rose.

En 1908, le golf figure encore au pro- gramme des Jeux olympiques, à Londres. Lyon y est, prêt à défendre sa médaille d’or, mais les golfeurs britanniques boycottent la compétition en raison d’un différend avec les officiels des Jeux. Les golfeurs américains refusent de se rendre à Londres dans ce climat d’incertitude, si bien que Lyon n’est plus que le seul golfeur en lice. Les officiels l’informent qu’ils lui remettront la médaille d’or, mais Lyon refuse d’accepter un prix à ses yeux immérité.

Cent dix ans ont passé depuis que George Seymour Lyon a gagné la médaille d’or olympique de golf, mais il n’en reste que deux avant qu’un autre Canadien n’ait la chance de répéter son exploit aux Jeux olympiques de Rio de Janeiro, en 2016.